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WAKING LIFE : LE FILM

Wiley prit la chaise en face du rocker.

« Hé, toi, qu'est-ce que tu fiches ici ?, demanda le jeune homme en riant.

Celui-ci lui répondit, sur le même ton, une bière à la main :

« Je vois bien comme un lubrifiant social pour le monde des rêves. J'aide les gens à devenir lucides plus facilement. Tu sais, en virant toute cette peur, et, après, en avant pour le rock !

Le jeune homme réfléchit un instant :

« Par devenir lucide, tu veux dire, savoir quand on rêve, d'acc ?

« Ouais, et après tu peux le contrôler. Les rêves lucides sont plus réalistes et moins bizarre que les rêves non lucides.

« Tu sais, répondit Wiley en secouant la tête, je viens juste de sortir d'un rêve. C'était pas comme un rêve ordinaire. Plus comme si j'étais, je me déplaçais dans une dimension parallèle ou quelque chose de ce genre...

« Ouais, c'est réel. Je veux dire, techniquement, c'est un phénomène du sommeil... mais tu peux t'éclater tellement plus en rêve. Et bien sûr, comme chacun sait, c'est l'éclate la règle.

Le rocker portait un pin's à tête de clown. Wiley ne l'avait pas remarqué au début, mais maintenant, ça lui tapait dans l'oeil, en quelque sorte.

« Ouais, répondit le jeune homme.

Il se frotta rapidement les yeux.

« Alors, qu'est-ce qui se passait dans ton rêve ?, demanda le Rocker.

« Heu, des tas de gens, des tas de discussions. Y 'en avait des plutôt absurdes, comme dans un film bizarre ou du genre. La plupart, c'était des gens qui se lâchaient à propos de trucs, vraiment intensement. Je me suis réveillé en me demandant : d'où ça vient tout ça ?

« Tu peux contrôler ça, tu sais... répondit le Rocker.

« Est-ce que... demanda Wiley, tu rêves comme ça tout le temps ?

« Oh oui, répondit l'homme. J'en retire toujours le meilleur. Mais le truc c'est, que tu dois d'abord te rendre compte que tu es en train de rêver. Tu dois être cap' de le reconnaître. Tu dois être capable de te poser la question : Hé, toi, est-ce que c'est un rêve ?

Le rocker lui fit un clin d'oeil :

« Tu vois, la plupart des gens ne se posent jamais cette question, quand ils sont réveilés et surtout quand ils sont endormis. Il semble que tout le monde dort debout quand il est réveillé et vit sa vie à travers ses rêves. Dans les deux cas, ils n'en retireront rien de bien passionnant.

Le jeune homme médita ces paroles quelques instants, puis reprit :

« La chose qui m'a fait tiqué et comprendre que je rêvais, c'était... C'était mon réveil numérique. Je, j'pouvais pas vraiment lire. On aurait dit que les circuits étaient foutus ou dans le genre.

« Ouais, c'est très courant, répondit le Rocker. Et les petits caractères imprimés sont aussi plutôt durs à lire. Très instables. Un autre truc, c'est d'essayer de régler les niveaux d'éclairage. Tu peux pas vraiment le faire. Si tu vois un interrupteur quelque part, allume et éteins, et vois si ça marche. C'est l'une des rares choses que tu ne peux pas faire dans un rêve lucide.

Le rocker se redressa :

« Je m'en fous : je peux voler, avoir une conversation intéressante avec Albert Schweitzer. Je peux explorer toutes ces nouvelles dimensions de la réalité. Sans oublier, que je peux faire l'amour de toutes les façons que je veux ! Ce qui est grave classe. Alors, pas pouvoir changer la lumière... tu parles !

Mais Wiley insistait :

« Alors c'est ça qu'on fait pour savoir si on rêve ?

« Ouais, mais comme je l'ai déjà dit, tu peux complètement t'entraîner à le reconnaître. Je veux dire, juste touche un interrupteur de temps en temps : si les lumières sont allumées, et que tu ne peux pas les éteindre, alors c'est presque sûr que tu rêves. Et alors tu peux te mettre au boutot, et crois-moi, c'est sans limites ! Hé, tu sais sur quoi je bosse en ce moment ?

« C'est quoi ?

« Tu sais, c'est grave ambitieux, mais je m'améliore. Essaie, toi : 360 degrés de vision, mon gars : Je peux voir dans toutes les directions ! Vraiment classe, non ?

Wiley gardait le sourire. Ce mec était complètement jeté.

« Ouais, vraiment... Bon, faut que j'y aille, mon man.

« Sans problème, répondit le Rocker. Vas y super-perfundo pour le premier jour de ta fête.

Il le salua, et se remit à boire sa bière. Le sourire du jeune homme se crispa.

« Qu'est-ce que ça veut dire ?, demanda Wiley, en passant nerveusement sa main dans les cheveux.

« Hé bien, tu vois, répondit le Rocker. J'ai jamais pu le savoir. Peux-être tu pourras. Ce type le murmure toujours à mon oreille. Louis. C'est un personnage récurrent dans mes rêves.

Wiley se sentait vraiment mal à l'aise à présent.

« Ouais... ».

Il se trouvait juste à côté de l'interrupteur. Il se mit à rire, et abaissa le commutateur. Il faisait toujours grand jour. Il releva le commutateur. Il y avait pourtant gravé dessus « marche ». Il l'abaissa à nouveau. Est-ce qu'il avait bien lu « marche » ? Oui. C'est ça, « marche ».

Il releva le commutateur à nouveau.

Il faisait toujours aussi clair.

La pièce était illuminée par un lustre suspendu en plein milieu du plafond.

Wiley abaissa le commutateur encore une fois.

Et encore.

Et encore.

Le Rocker hocha la tête.

Wiley sentit ses pieds quitter le sol...


Adaptation française de David Sicé, 7 avril 2005.

D’après un scénario de Richard Lindlaker.

Tous droits réservés Richard Lindlaker & 20th century Fox.

 

 

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